03/01/2014

Petra Collins - The teenage gaze

Article paru en décembre 2013

(Un nouvel article pour le délicieux 3petitspoints magazine ♥, sur Petra Collins. Enjoy it.)




Petra Collins est une jeune photographe et créatrice de mode d'une vingtaine d'années vivant à Toronto, dont le travail traite avant tout du corps des femmes, partout présent dans ses clichés, mais défait du soucis de beauté canonique qui l'accompagne bien souvent. Loin d'une vision conventionnelle de l'esthétique de ses modèles féminins, elle se démarque en photographiant ses sujets dans une vie quotidienne qui ne masque ni les bleus sur les jambes ni le maquillage qui coule, ni les moments les moins glamours.


 

Au travers de sa série de photos The Teenage gaze, Petra Collins interroge ou révèle des instants d'intimité de la vie d'adolescentes à ce moment critique où l'on passe de fille à femme.
On trouve dans ces photos des sous-vêtements, des téléphones portables, des brosses, des tubes de rouges à lèvre et beaucoup de miroirs. Des filles qui se regardent, toisent leur propre image, se maquillent, se questionnent peut-être, exactement comme si la photographe n'était pas là.



Ce qui transpire de ces photos c'est une esthétique au plus près de l'être qui, plutôt que de le mettre en scène, le laisse évoluer dans son milieu, en cours, dans les soirées, entre amis, et qui en capte tout à coup la singularité. Les modèles de l'univers de Collins ont cet air de force et de fragilité mêlées, de grande solitude au milieu des foules, assez caractéristiques de l'adolescence et du sentiment qu'apporte la découverte de soi-même en tant qu'individu singulier.
Ici, un mélange d'enfance et de féminité, les corps qui s'habillent ou se dévêtent, interrogeant la sexualité, la sensualité, le désir et tout ce qui forge une identité sexuelle et amoureuse.




On pense à Virgin Suicides de Sofia Coppola en faisant défiler les photos de The Teenage gaze, tant Collins a su capter les regards et les lumières, et cette atmosphères vaporeuse mais toujours au bord de l'implosion. Et parfois d'une grande simplicité, ces images n'en sont pas moins porteuses de mystères et de profondeurs, comme celle de cette jeune fille dans une voiture, et dont les yeux se perdent dans le vague.




A quoi pense-t-elle, on se demande. A quoi pensent-elles, quand elles observent le monde qui s'étend devant elles, depuis un balcon ou une fenêtre ? A quoi pensent-elles, assises dans une chambre enfumée, seules, en mini-short au milieu des objets de leur enfance, qui n'ont pas encore tous quittés la pièce?




Cette série de photos rappelle les longues heures passées à attendre que la vie avance et s'accélère, que quelque chose émerge de nous-mêmes et des autres.
Et si les sujets ne posent pas, ne fixent pas l'objectif, on perçoit quand même qu'un regard pèse sur elles, un regard intériorisé, celui d'un homme à qui il faut plaire peut-être, ou celui de la société toute entière: être belle, être féminine, être.




Car Petra Collins est photographe, mais photographe ouvertement féministe, prônant la reconquête du corps des femmes par elles-mêmes, et on ne peut envisager ses clichés sans penser à l'angle militant qu'ils peuvent avoir. La réponse à la question floue et polymorphe qui naît de cette série (attente, solitude, féminité...) pourrait donc être: fais-le toi, deviens ta propre réponse, aime toi-même ton corps.




Il est à noté d'ailleurs que Petra Collins s'est récemment faite remarquée par son travail avec Alice Lancaster, en créant une polémique autour d'un tee-shirt qu'elles ont fabriqué pour la marque de vêtements American Apparel. Le sujet de la polémique ? Euh. Voir le tee-shirt suffit à comprendre que les réactions furent vives et nombreuses.




Pour suivre le travail de Petra Collins c'est ici et .
Et un entretien en français à propos du fameux ticheurt.


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